Semaine du 17/12/2012 à 22h00 au 24/12/2012 à 22h00
La semaine est terminée, place aux réponses…
Frida
(Frida)
imdb
de Julie Taymor
— 2002
L'Ascension
(Voskhozhdeniye)
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de Larisa Shepitko
— 1977
— proposé par groucho
Les aventures du prince Ahmed
(Die Abenteuer des Prinzen Achmed)
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de Lotte Reiniger
— 1926
— proposé par ed crane
Histoire d'un Secret
(Histoire d'un Secret)
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de Mariana Otero
— 2003
— proposé par Blackula
Strange Days
(Strange Days)
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de Kathryn Bigelow
— 1995
— proposé par zemat
Draquila, l'Italie qui tremble
(Draquila - L'Italia che trema)
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de Sabina Guzzanti
— 2010
Un documentaire qui fait froid dans le dos, un film à voir sur la gestion des temps de crise qui devient dictatoriale, un film sur le monde qui nous entoure et ses dérives, un film à voir tout simplement.
— proposé par Rocka
Récréations
(Récréations)
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de Claire Simon
— 1998
— proposé par Zuul
Le Voyage de la peur
(The Hitch-hiker)
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de Ida Lupino
— 1953
— proposé par Zuul
Ma vie sans moi
(My Life Without Me)
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de Isabel Coixet
— 2003
— proposé par ed crane
Le Fils du Requin
(Le Fils du Requin)
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de Agnès Merlet
— 1993
— proposé par Xavier
Faut que ça danse !
(Faut que ça danse !)
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de Noémie Lvovsky
— 2007
Drôle d’oiseau que ce Salomon Bellinsky. Bientôt octogénaire, il suit des cours de claquettes et multiplie les rencontres par petites annonces interposées, tout en s'interrogeant sur le temps qui passe qu'on ne rattrape plus : sa compagnie d’assurance lui annonçant lors d’une séquence drolatique qu’elle refuse de lui renouveler son contrat, il se met en quête d’une nouvelle compagne, comme pour fuir l'implacable réalité numérique de son âge. La régression de son ex-épouse jusqu’à l’infantilisation (Bulle Ogier, Indice 2, délicieuse et touchante) le convainc ainsi de bouleverser un peu le cours inéluctable et la monotonie de son existence, refusant de subir la compassion des autres pour demeurer jusqu’à l’excès l’acteur principal de sa propre vie.
Mais Faut que ça danse ! est aussi l’histoire de sa fille, Sarah (impeccable Valeria Bruni-Tedeschi), narratrice du film, traversée de multiples interrogations sur son statut de femme, de femme juive, et même de femme juive enceinte (Indice 1). En plein trouble identitaire, la jeune femme harcèle Salomon de questions sur son passé, sur sa famille, sur son statut de père et sur ce qu’il lui aura transmis, questions que le vieil homme cherche surtout à esquiver. Dans cette difficile communication intergénérationnelle, le noyau de Faut que ça danse ! se révèle alors du côté de la Seconde Guerre mondiale, et plus particulièrement des camps de concentration auxquels Salomon survivait tandis que ses amis « y partaient en fumée » (sic). Sa nonchalance face aux problèmes bénins du quotidien, sa fantaisie autant que sa soudaine gravité, et cette aura de mystère qui le rend insaisissable y compris auprès de sa propre fille, sont autant de réponses trouvées par le personnage à la question de son âge mais aussi de sa « sur-vie ». Et quand Salomon, finalement, concède quelques souvenirs (l’assassinat d’Hitler, Question !), ceux-là passent par le filtre de la dérision, comme si pour s’extirper du tragique, la jubilation presqu’outrée était sa seule échappatoire.
Ce beau fiilm de Noémie Lvovsky repose dès lors sur une curieuse et constante alchimie entre la pesanteur du réel et la légèreté du regard posé sur celui-ci. Finalement, sous ses airs faussement anodins, Faut que ça danse ! propose une réelle philosophie de vie, résumée par ce titre laid mais pertinent et par cette magnifiquement modeste scène finale ; tant dans la légèreté du pas que dans la manière dont, selon le contexte, celui-ci peut être forcé, véritablement, il faut que ça danse…
— proposé par ed crane
Punisher : War Zone
(Punisher : War Zone)
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de Lexi Alexander
— 2008
Après la sympathique -mais ratée- version des années 80 avec Dolph Lundgren et celle plus récente -mais encore plus moisie- avec Thomas Jane et John Travolta, Punisher War Zone est la troisième adaptation du personnage de chez Marvel. Le film a beau être sorti directement en dvd chez nous et être passé totalement inaperçu, il s'avère que c'est le meilleur des trois ! Alors, je ne sais pas si la réalisatrice Lexi Alexander y est pour beaucoup, mais en tout cas le choix du casting, oui ! Car on retrouve deux sympathiques acteurs HBO en tête d'affiche, le taciturne Ray Stevenson (Rome, Irish Gangster) et le déjanté Dominic West (Sur Ecoute). De plus, le fait qu'il n'y ai pas de star "bankable" permet aussi à la réalisatrice de se lâcher sur la violence qui incombe à ce personnage, puisqu'il n'est qu'un psychopathe qui exécute à tour de bras tous ceux qu'il estime dangereux, en particulier les mafiosis -qui sont à l'origine de la mort de sa famille et donc, de son ancienne vie-. Bref, ce film est loin d'être un chef d'oeuvre, mais il est suffisamment fun et bourrin pour passé un agréable moment.
— proposé par L'Etranger
Tiny Furniture
(Tiny Furniture)
imdb
de Lena Dunham
— 2010
— proposé par zemat
Film d'amour et d'anarchie
(Film d'amore e d'anarchia)
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de Lina Wertmüller
— 1973
— proposé par groucho
Molière
(Molière)
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de Ariane Mnouchkine
— 1978
— proposé par Blackula
Gas Food Loging
(Gas Food Lodging)
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de Allison Anders
— 1992
— proposé par Xavier
Winter's bone
(Winter's bone)
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de Debra Granik
— 2010
Ree a 17 ans, et tente de survivre dans un taudis au fin fond du Missouri, à s’occuper d’un jeune frère et d’une petite sœur : sa mère est à l’agonie et son père, multi-récidiviste en attente de jugement, a fui il y a plusieurs semaines de cela. Mais lorsque les huissiers de justice viennent la prévenir qu’ils sont sur le point de venir saisir leur maison, elle sait qu’elle n’a pas le choix et qu’elle doit partir retrouver ce père, quelque part dans son monde de violence, de drogue et de vengeance.
Les premières images du film, en pré-générique, nous montrent deux gamins jouant au milieu de ce qui ressemble moins à un jardin qu’à un terrain vague, et sont accompagnées d’une ballade folk dans laquelle, en lieu et place du nom de l’Etat américain où se déroule l’action du film, on entendrait presque « Way Down in Misery ». Car c’est bien là, dans le fond du fond de cette Amérique des trous perdus et des Rednecks, de la country et de la méthadone, du froid et du désespoir, que nous emmène Debra Granik pour son deuxième long-métrage, multi-primé en festival (notamment à Sundance) et quasi-unanimement salué par la critique de l’autre côté de l’Atlantique. Le film confronte une jeune protagoniste, pas encore adulte mais déjà plus du tout une enfant, à une galerie pas possible de gueules burinées par le temps, l’alcool, et la rancœur, entre des femmes fanées par la désillusion (dont Sheryl « Laura Palmer » Lee, méconnaissable) et des hommes impulsifs, mutiques et menaçants. Par sa rage de survivre malgré tout, et sa capacité à surmonter toutes les adversités ou les intimidations, Ree (formidable Jennifer Lawrence) rappelle ces héros des romans noirs hard-boiled signés Dashiell Hammett ou de Raymond Chandler, des obstinés qui baissaient la tête et avançaient, coûte que coûte. C’est à ses côtés et dans son indécision que nous évoluons, et que nous ressentons comme elle l’hostilité du monde ; le film baigne ainsi dans une telle tension sourde qu’on y pressent en permanence l’imminence du pire, à tel point que l’on serait prêt à décrire cette éprouvante expérience comme un film "violent" alors qu’il ne s’y déroule à peu près aucun acte de violence : l’atmosphère seule fait office d’étouffoir, par son univers sonore lancinent, par sa photographie réaliste de toute beauté, par un souci permanent de laisser le temps ou les silences générer l’inquiétude. Winter’s Bone est ainsi un film sans grande fantaisie (hormis une brève parenthèse en noir et blanc auprès d’écureuils, proposée en question…), mais sa puissante linéarité et sa densité dramatique lui confèrent justement toute son efficacité : il s’agit là, indéniablement, d’une des plus belles découvertes récentes que nous ait offert le cinéma indépendant américain.
— proposé par ed crane
Le Mariage des moussons
(Monsoon Wedding)
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de Mira Nair
— 2001
— proposé par Roy Neary
« Un ruban autour d’une bombe » ; ainsi parlait André Breton de la peintre mexicaine Frida Kahlo, artiste fascinante à l’existence tragique : petite femme volontaire handicapée à vie par un accident d’autobus, qui se mit à peindre pendant sa longue convalescence, projetant dans ses tableaux tout son univers intérieur violent et coloré, et qui entretint avec Diego Rivera, lui même un peintre majeur engagé politiquement, une passion tumultueuse aussi stimulante que destructrice.
Ce destin haut en couleur ne pouvait qu’inspirer les biographes divers, et si le Prix Nobel de littérature français, Jean-Marie Le Clézio, leur consacra une œuvre de référence, Diego et Frida, en 1995, le film de Julie Taymor s’inspire lui essentiellement de la biographie d’Hayden Herrera datant de 1983. A la publication de ce roman, la productrice Nancy Hardin en avait acheté les droits, mais s’était alors heurtée à l’indifférence des studios vis-à-vis d’une artiste alors injustement négligée. Ce n’est que grâce à l’insistance de la productrice-comédienne Salma Hayek, grande admiratrice de Kahlo, et accessoirement au regain de cote des œuvres de Kahlo sur le marché de l’art, que le projet est enfin confié, en 2001, à Julie Taymor (tandis qu’un projet parallèle, porté par une Jennifer Lopez en pleine rivalité latine avec Salma Hayek, échouera). Manifestement, la cinéaste américaine, rôdée aux planches de Broadway était la femme de la situation, tant son propre univers visuel coloré et foisonnant trouve un écho particulièrement efficace dans les œuvres onirico-masochistes de l’artiste mexicaine. En effet, de Titus (1999) à Across the Universe (2007, que j'avais déjà proposé lors d'une session précédente), Julie Taymor est une cinéaste ayant d’ores et déjà affirmé sa grande audace formelle, parvenant à instaurer une atmosphère chaleureuse aussi souvent traversée par de sympathiques bricolages rétro que par de véritables fulgurances picturales. Alors, certes, dans ce généreux fatras, certaines idées valent mieux que d’autres, mais en particulier, les instants où Frida prend vie au sein de ses propres œuvres sont parmi les plus saisissants d’un film qui parvient alors à capter tout autant les déchirements intérieurs que les folles rêveries de l’artiste. Malgré tout, si Frida se contentait de telles illustrations, ce ne serait guère plus qu’un joli (très joli) livre d’images. Mais en se concentrant sur la complexité de la relation Kahlo/Rivera, sur ces artistes géniaux dévorés par leurs aspirations contradictoires, Frida est avant tout une flamboyante histoire d’amour, tragique et renversante, portée par ses deux comédiens en état de grâce. Impliquée dans ce qui demeurera probablement le rôle de sa vie (certaines peintures vues dans le film sont d’ailleurs réellement les siennes), jamais Salma Hayek n’avait été aussi juste et émouvante ; en face d’elle, l’indispensable Alfred Molina compose un Diego Rivera d’une richesse inouïe, génial dans sa médiocrité, adorable dans sa monstruosité, puissant dans ses faiblesses et follement passionné dans son inexcusable lâcheté... Oxymores que Rivera utilisait lui même lors de la première exposition de sa compagne, en 1938, parlant d’une « oeuvre acide et tendre, dure comme l'acier et délicate et fine comme une aile de papillon, aimable comme un beau sourire et profonde et cruelle comme l'amertume de la vie. » L’une des plus belles réussites de ce film mêlant aussi bien la pudeur et l’excès est d’arriver, par ce biais, à évoquer l’amer et délicat envol de l’artiste...
— proposé par ed crane